Jazz à Vienne - Piano Solo
Chronique de Jean-Marc Aguirre pour Jazz-Rhône-Alpes :
C’est dans le cadre de l’organisation de Jazz à Vienne et dans le petit écrin somptueux de l’auditorium de la médiathèque de Vienne qu’était attendu Jean Kapsa pour une nouvelle performance, seul au piano.
Et c’est avec une heure de retard qu’il démarre son set, un bouchon monstre entre Valence et Vienne l’ayant retenu plus de deux heures sur l’autoroute.
Malgré cet incident et la contrariété qu’il aurait pu susciter chez lui, Jean Kapsa est imperturbable, avec calme et assurance il rentre à nouveau en communion avec son piano.
Il a scindé son spectacle en deux parties.
Dans un premier temps il joue cinq morceaux, écrits, de son tout nouveau répertoire en solo, qu’il avait présenté au mois de septembre au Périscope de Lyon : “Clouded Mind”
Ces morceaux sont d’une grande densité, avec des lignes mélodiques très marquées, mais propices à des digressions ingénieuses. J’ai l’impression que leur interprétation a gagné encore en inventivité, et qu’ils sont mûrs pour être enregistrés et régaler nos oreilles et notre imagination de façon plus durable.
Ce répertoire est issu d’un travail original auquel s’est astreint Jean Kapsa, celui d’enregistrer pendant cent jours des miniatures improvisées, qu’il publiait jour après jour sur son site Web et qui ont fait l’objet d’un album : “Improvisations”.
Aussi pendant la deuxième partie du spectacle, ce sont trois espaces d’improvisation que l’artiste nous propose. Des moments complètement éphémères pour le coup ; ce soir peut-être ont-ils été plus torturés en repensant aux vingt-et-unes tonnes de jambon déversées sur l’autoroute un peu plus tôt dans la soirée.
Pendant ces espaces Jean Kapsa reprend des “modèles” qu’il a déjà travaillés et que l’inspiration du jour va remodeler. L’improvisation c’est d’abord beaucoup de travail puis du talent et enfin la magie de l’instant.
La musique nous donne à partager des émotions, là où les mots restent insuffisants, l’improvisation nous permet-elle, me semble-t’il, d’accéder à un niveau d’abstraction supplémentaire comme l’accès à des niveaux de rêve plus profond à partager. Il faut lâcher prise et se laisser perdre : so “Let’s get lost”.
Jean Kapsa a pris encore de l’épaisseur, et peut-être aussi une dimension mystique, et ce n’est pas simplement dû à son nouveau look de barbu. Heureusement les mystiques tentent toujours de transmettre leur compréhension du monde aux pauvres mortels bienheureux que nous sommes,
…et qui en redemandent.